Auteur

Jean-Luc Doumont

Le positionnement avantageux du Saguenay-Lac-Saint-Jean en tant que porte d’accès à la Côte-Nord et au Nord du Québec a eu, et continuera à avoir dans les années à venir, d’importants impacts positifs sur notre économie.

Par Roger Boivin
Chroniqueur économique

On n’a qu’à penser à la très importante grappe économique régionale liée à la construction et aux grands travaux pour s’en convaincre. Mais, me direz-vous, en quoi la construction éventuelle d’un tunnel qui réunirait l’Ile de Terre-Neuve au Labrador nous concernerait ?

Napoléon disait que la politique d’un État était dans sa géographie. Je vous invite donc à consulter la carte qui accompagne ce texte. Vous y constaterez que la distance entre la ville de Québec et Saint-Jean de Terre-Neuve en passant par la Côte-Nord et un nouveau tunnel sous le détroit de Belle Isle serait de 2 360 km ou 27 heures de route (cela nécessitera également de prolonger la route 138 de La Romaine à Blanc-Sablon au Québec).

Des économies substantielles

Par le tracé actuel, une charge de camion doit parcourir la même distance (2320 km ou 23 heures), mais doit en plus emprunter un traversier qui coûte autour de $ 500 le passage, tout en ajoutant 8 heures au trajet (6 heures de navigation et 2 heures d’attente), pour un trajet total de 31 heures. Un nouveau tunnel génèrerait donc une économie de temps d’environ 15 % et de  $ 500 par voyage de camion (ceci sans compter le temps/coût de retour du camion), en plus d’être plus sécuritaire. Imaginez également l'importance des volumes de produits qui pourraient être expédiés à partir de chez nous.

Actuellement, 35 % de tout le trafic routier commercial à destination de l’Ile de Terre-Neuve vient de fournisseurs situés à l'ouest de la ville de Québec, qui seraient immédiatement avantagés de passer par la Côte-Nord/le Saguenay-Lac-Saint-Jean et le nouveau tunnel, plutôt que par le trajet actuel. Le 65 % restant de l’approvisionnement actuel de l’ile de Terre-Neuve pourrait être bien moins coûteux à faire transiter, par ou à partir du Saguenay-Lac-Saint-Jean, si un tunnel réunissant l’Ile de Terre-Neuve au Labrador était construit.

Bien que la province de Terre-Neuve soit notre voisine, elle est peu connue au Québec. Rappelons-nous que l’économie de l'ile (525 000 habitants) s’accroit en moyenne de 7 % par an depuis plus de 15 ans. En termes concrets, l’économie  combinée de Terre-Neuve et du Labrador représente déjà 34 milliards de $ par an. Un chiffre qui s’accroit en moyenne de plus de 2 milliards de $ par an…

Faisabilité du tunnel

La faisabilité technique d’un tel tunnel a été démontrée en 2004 par une étude détaillée de la firme d’ingénieurs Hatch Mott MacDonald. Pour un tunnel de 26 km, on estimait alors les coûts de construction à 1,2 milliard de $ (sans compter la prolongation de la 138 au Québec), pour un achalandage prévu à terme d’environ 3 500 véhicules par jour. L’élargissement de la route du Parc des Laurentides a coûté 950 millions de $ pour une circulation comparable, alors que le Pont de la Confédération de 13 km de long, réunissant l’Île-Du-Prince-Édouard au Nouveau-Brunswick, a coûté 1,2 milliard de $ en 1997.

Une opportunité pour la région

Il est bien évident que de réunir physiquement l’ile de Terre-Neuve au Labrador et au reste du Canada est une idée qui, en plus d’un intérêt économique certain, prend une immense signification politique, autant pour les citoyens de Terre-Neuve que pour ceux du reste du Canada. Il y a bien sûr des partisans et des opposants à ce projet, mais soyons certains qu’il se réalisera. Considérant que le positionnement économique du  Saguenay-Lac-Saint-Jean sera des plus avantagés par la concrétisation d’un tel lien avec Terre-Neuve, notre région aurait donc tout intérêt à suivre ce dossier de bien plus près.

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