Guy Bouchard
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Guy Bouchard

Voici la UNE du journal du mois de mai 2021

SAGUENAY – La chaîne régionale LCR Vêtements et Chaussures est un autre exemple concret de l’impact important que la pandémie de la COVID-19 a eu dans le monde du commerce de détail. Mais dans le cas de cette entreprise, qui a aussi subi les contrecoups de la crise, les effets ont été somme toute positifs. À terme, ils se concrétisent en une forte accélération de l’installation de la relève. Et, en même temps, l’engouement pour l’achat local a permis à l’entreprise de garder sa position stratégique dans le marché régional du détail, mais du secteur commercial aussi.

« Nous étions dans un projet de relève depuis deux ans, notamment avec Moniqua Pineault-Gagnon à titre de directrice générale, mais le processus s’est accéléré à la vitesse grand V dans le contexte de la pandémie. Le 23 mars dernier, on fermait tous nos commerces pour les rouvrir le 15 avril, parce qu’on nous considérait comme service essentiel, puisque nous offrons des vêtements de travail et des équipements de sécurité. Dans la dernière année, les membres de mon équipe de direction ont tout vu. Ils ont dû conjuguer avec le manque de personnel, les difficultés d’approvisionnement, les restrictions au niveau du transport », explique l’ex-directeur général de LCR, qui, après quelque 25 ans à ce poste, occupe désormais la chaise de conseiller sénior auprès de l’équipe de direction.

Une relève jeune, mais expérimentée

« Même si on avait beaucoup de compétence à l’interne, on avait le choix d’aller à l’externe pour la relève, mais ça aurait été compliqué, particulièrement pour la culture de l’entreprise. Moniqua a vraiment de belles qualités et a fait toutes les étapes dans l’organisation. Moi, je veux rester à mi-temps pour conseiller nos jeunes ressources. Tant que je vais me sentir utile, je vais rester », confie-t-il. De son côté, Moniqua Pineault-Gagnon est très motivée par ses nouvelles responsabilités de directrice générale. Il faut souligner que la jeune femme travaille dans l’entreprise depuis 16 ans déjà. Elle a débuté au bas de l’échelle, à temps partiel, alors qu’elle était étudiante au niveau secondaire. Par ailleurs, le fait que Pierre Delisle reste actif dans l’entreprise la rassure grandement.

« LCR tatoué sur le cœur »

« C’est sûr que la pandémie a accéléré mon apprentissage. Mais comme je suis passée par tous les départements de l’entreprise, j’étais quand même prête. […] Le quotidien nous rattrape vite dans des périodes comme ça et on apprend à grande vitesse. C’est sûr que le fait que Pierre soit encore présent, c’est rassurant pour moi et le reste de l’équipe. Mais il faut regarder en avant et aller au fond des choses. […] Moi, LCR, c’est ma famille. J’ai le logo LCR tatoué sur le cœur », lance Moniqua Pineault-Gagnon. Elle avoue cependant que les défis de son nouveau poste sont importants, notamment au chapitre de sa crédibilité auprès des employés, mais aussi des partenaires et fournisseurs. « Même si ça va très bien, il reste que l’autorité n’est pas la même. Il faut que je travaille plus fort à ce niveau, mais j’apprends très rapidement. ». De son côté, Pierre Delisle se fait rassurant. « Elle prend sa place de plus en plus et son profil nous permet aussi de rajeunir notre image », explique-t-il.

La COVID stimule les ventes

Malgré le contexte particulier des derniers mois, LCR Vêtements et Chaussures est en forte croissance, aux dires de Pierre Delisle. Le chiffre d’affaires, qui se situe à près de 10 M$ (approximativement 55 % proviennent du marché du détail et 45 % de la clientèle commerciale), n’a pas été affecté par la pandémie. Ce serait même plutôt le contraire, de l’avis de Pierre Delisle. « Dès le début de la pandémie, on a été identifié comme service essentiel. On est un peu à l’inverse du commerce de détail habituel », souligne-t-il, expliquant qu’une forte hausse du volume de ventes a été constatée, particulièrement du côté du détail. « L’engouement pour l’achat local a sûrement eu un impact là-dedans. Les clients se sont rapprochés des commerces locaux », estiment Moniqua Pineault-Gagnon et Pierre Delisle.

Une nouvelle succursale à Saint-Félicien

La pandémie a aussi ralenti sensiblement le développement de la chaîne régionale en retardant de quelques mois l’ouverture du futur site de LCR Vêtements et Chaussures à Saint-Félicien. Le neuvième magasin de la chaîne devait ouvrir l’automne dernier, mais l’impact de la COVID-19, notamment sur la disponibilité des entrepreneurs, a chamboulé quelque peu le projet. Quoi qu’il en soit, la succursale félicinoise devrait finalement ouvrir au cours des prochaines semaines et nécessiter un investissement de quelque 400 000 $.

« Ça faisait longtemps qu’on y pensait. Ça nous permettra d’être présents à l’échelle de toutes les villes de la région. […] Notre succursale de Roberval était déjà en forte hausse, mais on pense que Saint-Félicien est aussi un marché important pour l’entreprise, sans compter que la compétition n’était pas présente là-bas. Nous serons ouverts en juin, à un jet de pierre du centre d’achat, si tout va bien », estime prudemment Pierre Delisle.

Une forte évolution technologique

À titre de gestionnaires intergénérationnels, Moniqua Pineault-Gagnon et Pierre Delisle sont bien conscients que le commerce de détail est en forte évolution. D’ailleurs, ils confirment que LCR a pris le virage de la vente en ligne il y cinq ans et que leur site transactionnel gère un volume de ventes en constante augmentation. La jeune DG considère qu’en plus des transactions, il s’agit d’une fenêtre de visibilité incontournable pour l’entreprise et ses produits. Toutefois, elle confirme que la prochaine étape technologique, qui est en cours d’évaluation, sera majeure, notamment la clientèle commerciale, alors que le site pourra informer ces acheteurs des inventaires de produits disponibles, en temps réel.

Mais pour l’heure, un autre projet de taille est en cours pour l’équipe de LCR. La chaîne fait actuellement l’objet de l’implantation d’un nouveau système de points de vente numérique (POS). Quelque 250 000 $ sont donc en cours d’investissement pour remplacer les systèmes de caisses enregistreuses actuelles par un réseau informatique haut de gamme. Bien entendu, le projet comprend l’achat d’équipements et d’applications de gestion sophistiqués, mais aussi d’un serveur de haute capacité où seront configurées et gérées les fiches de plus de 50 000 codes de produits, vendus en ligne et dans les commerces de la chaîne. Une tâche colossale.

Une expansion hors région ?

Lorsqu’une chaîne régionale vit une telle croissance et s’appuie sur une relève de qualité, il peut-être tentant pour ses gestionnaires de penser à une expansion en dehors du territoire naturel. Pierre Delisle avoue que, même s’il y a une demande potentielle dans les régions limitrophes, les défis sont trop nombreux actuellement pour l’entreprise pour envisager un éventuel projet à l’extérieur du Saguenay–Lac-Saint-Jean.

« C’est sûr qu’on a eu des demandes pour d’autres marchés, mais actuellement, on a bien d’autres défis à relever, notamment au niveau de l’approvisionnement », lance-t-il, en s’empressant de souligner que celui de la sempiternelle rareté de la main-d’œuvre est aussi et toujours un enjeu de taille pour l’organisation d’une cinquantaine de personnes.

C’est d’ailleurs un souci constant qui occupe les pensées de Moniqua Pineault-Gagnon. Elle assure que malgré que le personnel soit bien traité et reçoive un traitement compétitif pour ce type d’emploi, le recrutement et la rétention du personnel requièrent beaucoup d’énergie pour l’équipe de direction. Elle sait qu’elle peut compter sur son mentor Pierre Delisle pour l’épauler et la conseiller à ce chapitre, mais également sur l’appui de plusieurs de ses collègues gestionnaires, notamment les fils de l’ex-DG, soit Mathieu et David Delisle.

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