Auteur

Karine Boivin Forcier

N.D.L.R. Le texte qui suit fait partie d’un dossier rédigé dans le cadre du cahier thématique dont le thème est : « Nos mines, une richesse à exploiter » publié dans notre édition du mois de mars.

SAGUENAY – Le gouvernement du Québec s’est fixé comme objectif de devenir un chef de file en matière de production, transformation et recyclage des minéraux critiques et stratégiques. Avec un sol au fort potentiel pour ces matières, le Saguenay–Lac-Saint-Jean pourrait bien tirer profit de cette conjoncture.

Les termes critiques et stratégiques désignent des minéraux qui ont à la fois une importance économique et un risque d’approvisionnement, tout en n’ayant pas de substituts connus actuellement. « Soit il y a un seul fournisseur, soit les fournisseurs sont situés dans des pays où la stabilité politique est incertaine, ou encore la ressource est très rare », explique Paul Bédard, ingénieur et directeur par intérim du Centre d’études sur les ressources minérales (CERM) à l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC).

Ces minéraux, comme le cuivre, le graphite, le niobium, le zinc, le cobalt, le nickel, le titane, le tantale ou le lithium, sont utilisés dans différents objets, comme les cellulaires, ordinateurs ou batteries rechargeables. L’avènement des technologies vertes contribue aussi à augmenter leur demande. « On veut se diriger vers des façons de produire et de stocker l’énergie qui sont différentes, aller vers l’éolien, le solaire. On veut électrifier le transport. Ce sont toutes de nouvelles technologies qu’il faut penser. Qui dit nouvelles technologies dit besoin de nouveaux matériaux pour les construire », indique M. Bédard.

Un potentiel connu

Le potentiel de la région en lien avec ces minéraux est déjà connu depuis plusieurs années. « Nous avons une géologie favorable à la présence de plusieurs de ces éléments. Il y a évidemment la mine Niobec, mais nous avons plusieurs indices dans plusieurs de ces substances, entre autres le nickel, le cuivre, le graphite, le cobalt, les terres rares, le niobium, le tantale, le titane, le vanadium », résume Benoit Lafrance, géologue et directeur de la Table régionale de concertation minière (TRCM).

Si les indices sont identifiés depuis plusieurs années, dans le domaine minier, tout est une question de demande, ce qui explique que les investigations n’aient pas été poussées plus loin. « Actuellement, la demande est grandissante en raison de l’opportunité liée au développement des nouvelles technologies. » En effet, le Plan québécois pour la valorisation des minéraux critiques et stratégiques 2020-2025 évalue par exemple que la demande en minéraux nécessaires à la transition énergétique augmentera de 2018 à 2025. On peut penser notamment au graphite (494 %), au lithium (488 %), au cobalt (460 %) et au vanadium (189 %).

Par ailleurs, l’énergie facilement accessible, les infrastructures de transport, les capacités des transformateurs et équipementiers, de même que l’expertise scientifique régionale, notamment en matière de recherche, viennent aussi jouer en faveur de la région pour le développement de projets en lien avec ces minéraux.

Plus grande anorthosite

En raison du potentiel géologique régional, certains minéraux critiques et stratégiques pourraient être plus pertinents à cibler pour le Saguenay–Lac-Saint-Jean. Les chercheurs se penchent d’ailleurs sur le sujet. « Dans les grands gisements de titane au Québec, il y a le lac Tio sur la Côte-Nord, qui est dans une roche nommée anorthosite. L’une des plus grandes anorthosites du monde, c’est celle du Lac-Saint-Jean. Nous avons des chercheurs qui tentent de mieux comprendre cette unité de roche pour voir s’il serait possible de développer des gisements de titane. [...] On tente, d’une façon plus théorique, de déterminer où pourrait se trouver la ressource dans un tel milieu », illustre Paul Bédard.

Parmi les minéraux d’intérêt pour la région, il y a également le niobium et le tantale, non seulement en raison de la présence de Niobec, mais également de celle du gîte Crevier. Celui-ci, situé à 50 km de Girardville, est maintenant propriété principalement de Niobay Metals. Une étude économique préliminaire avait confirmé la viabilité économique du projet, mais l’étude de faisabilité avait été suspendue en raison des conditions de marché à ce moment. En 2022, l’entreprise se concentre toujours sur un autre de ses projets et n’a pas prévu de travaux supplémentaires sur ce gîte, en dehors de quelques tests de laboratoire.

Pour lire les autres textes du cahier:

LE POTENTIEL MINÉRAL DE LA RÉGION RÉVÉLÉ GRÂCE À LA GÉOMATIQUE

GÉOMÉTALLURGIE | UN INTÉRÊT POUR L’EXPLORATION PRÉCOCE

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